Le Conseil départemental et métropolitain de la citoyenneté et de l’autonomie (CDMCA ) a presque 10 ans. Il est créé par l’article 81 de la loi n° 2015-1776 du 28 décembre 2015, relative à l’adaptation de la société au vieillissement. Il résulte de la fusion du comité départemental des retraités et des personnes âgées et du conseil départemental consultatif des personnes handicapées
Le but du CDMCA est de permettre, dans les territoires, la construction collective des politiques publiques en faveur du grand âge et du handicap, en associant les publics concernés, les syndicats, les employeurs, les services de l’état, les collectivités territoriales.
Gilbert Dumas et moi-même sommes élus en tant que représentants de la FSU au CDMCA depuis décembre 2023.
Le CDMCA se réunit en assemblée plénière 2 fois par an. C’est une instance consultative. Avant chaque assemblée, il nous est donné une documentation informative sur les politiques de l’autonomie à la fois départementales et métropolitaines, et sur les projets en cours. Nous analysons ces documents afin de faire entendre dans ces assemblées nos revendications pour une véritable prise en compte de l’autonomie.
La Métropole et le Département sont confrontés à l’évidence démographique d’un nombre de personnes âgées de plus de 75 ans qui devrait atteindre 11 millions d’ici à 2050, soit un doublement de leur part dans la population totale pour atteindre 16 %. De plus, les attentes et les besoins de la génération à venir qui a connu les années 60/70 sont sans doute différents des générations précédentes, peut-être plus exigeants en matière de liberté, de prise en compte de leur parole.
Or au niveau national il n’y a pas la volonté politique d’apporter des réponses à cette nouvelle donne sociale : la loi du bien vieillir est insuffisante et il n’existe aucun financement pour l’appliquer. Dans ces conditions, l’impression que nous avons est que, malgré des efforts pour faire face au défi social, la Métropole et le Département en sont réduits sur bien des points à du bricolage.
L’assemblée plénière du 24 mai, portait sur l’habitat inclusif.
Nous avons en préambule fait une déclaration signée de l’ensemble des syndicats pour demander le remboursement des frais de déplacement en avançant le fait que le CDMCA est une instance officielle créée par la loi, et qu’à ce titre elle se doit de donner à chacun les moyens de participer. Nous avons ajouté que d’autres départements l’ont fait favorisant ainsi le fonctionnement démocratique.
Nous avons pointé tous les manques en matière de prise en charge de l’autonomie : la fragilité de l’offre en Ehpad dans le Rhône, l’insuffisance du nombre d’Ehpad publics, le vieillissement des résidences autonomie gérées par le public, l’inadaptation des logements au virage domiciliaire, le manque crucial de personnels d’accompagnement en structure et à domicile, l’insuffisance de formation et de salaire, l’absence d’un statut valorisant.
Nous avons aussi évoqué le difficile accès à la santé affecté par un manque de médecins, une dégradation constante et programmée de l’hôpital public.
Nous avons demandé à la Métropole et au Département de transmettre au niveau national nos revendications afin de peser sur les choix politiques et financiers à venir.
La Métropole met l’accent sur le développement de l’habitat inclusif.
Elle en donne la définition suivante : « une solution de logement destiné aux personnes handicapées âgées qui ont fait le choix à titre de résidence principale, d’un mode d’habitation regroupé entre elles et avec d’autres personnes. Ce sont de petits espaces indépendants, caractérisés par des espaces de vie individuelle associés à des espaces de vie partagée, dans un environnement adapté, sécurisé et à proximité de services. Ce mode d’habitat est assorti d’un projet de vie sociale et partagée co- construit avec les habitants ».
Dans la Métropole, il s’agit de 40 projets d’habitat inclusif dont 20 en fonctionnement. Cela s’adresse à 500 personnes âgées et handicapées confondues. Dans le département du Rhône, 11 projets dont 3 en fonctionnement concernent 146 personnes.
Nous avons dit l’intérêt de cet habitat qui répond à l’exigence de lien et de participation sociale, mais avons fait remarquer que ces habitats ne sont pas adossés à des accompagnements en matière de soin.
Nous avons surtout insisté sur le fait qu’ils s’adressent à un public dont la perte d’autonomie est partielle et que cela laisse de côté tous les autres : certains Ehpads sont en déficit dû à des situations de sous-financement ; il faudrait de plus s’orienter vers une transformation des Ehpads pour en faire de véritables lieux de vie.
Reste aussi la question de tous les habitats intermédiaires : les résidences autonomie publiques nécessitent une rénovation, et dans la Métropole un bon nombre de résidences séniors sont gérées par le secteur privé à des tarifs prohibitifs pour beaucoup de personnes.
L’Assemblée plénière du 26 septembre a porté sur l’aide à domicile.
Considérant que le projet de vie à domicile s’est imposé comme l’axe central du projet politique d’accompagnement des personnes âgées, le bureau Personnes Âgées (PA) auquel nous participons, a suscité cette assemblée.
Nous avons fait précéder cette réunion d’un questionnaire cherchant à pointer l’ensemble des besoins en matière d’aide à domicile. Nous avons demandé un temps d’intervention pour Marylène Cahouet afin qu’elle présente les recommandations du Haut conseil de l’âge auquel elle participe.
Nous sommes intervenus sur le fait que 30% de personnes âgées dans la Métropole renoncent aux soins, et ce pour 2 raisons essentielles :
a) Un reste à charge trop important
b) Une insuffisance du personnel salarié
a) En ce qui concerne les raisons financières, nous avons soulevé la question de l’ Allocation personnalisée d’autonomie (APA) autour duquel le département structure son action, et des prestataires qui interviennent.
- Nous avons mis en cause la grille à partir de laquelle se fait l’évaluation de l’APA. Cette grille Autonomie gérontologique groupes iso-ressources (AGGIR) qui sert de référence pour le classement dans un groupe iso-ressource (GIR) donné, est décisive pour l’éligibilité à l’APA à domicile et pour la détermination des plans d’aide. Les plafonds de l’APA étant définis en se fondant sur ses critères.
Or cette grille date de 2002. Elle ne tient pas compte des évolutions démographiques, médicales, sociétales. Elle n’est pas adaptée au domicile, couvre mal en particulier les troubles neuro dégénératifs et cognitifs compromettant le maintien à domicile des personnes affectées par ces maladies.
Nous avons souligné non seulement l’insuffisance mais la baisse constante, depuis l’origine de leur existence, des plafonds qui fixent les montants mensuels de l’APA, expliquant ainsi qu’un certain nombre d’allocataires ne consomme pas l’intégralité des soins prescrits.
Nous avons aussi évoqué pour le dénoncer le fait que, concernant l’éligibilité à tel ou tel GIR, le département est à la fois celui qui évalue et finance, ce qui peut expliquer, en cas de contrainte budgétaire, son hésitation à classer la personne en GIR4, dernier GIR qui donne accès à des aides.
- Toujours concernant le reste à charge, nous avons constaté que les prestataires en charge de l’aide à domicile, sont majoritairement des entreprises privées : 119 entreprises privées pour 10 publiques dans la Métropole, 43 entreprises privées pour 1 seule publique dans le Département. Or, la plupart du temps le privé facture au-delà du tarif national.
b) La question du personnel est cruciale : le problème du recrutement est énorme
C’est d’abord une question de nombre.
La Métropole le reconnaît. Son vice-président Pascal Blanchard dit dans AEF.info : nous n’effectuons « pas de contrôle à domicile car nous n’en avons pas les moyens ». Il ajoute que la Métropole fait appel à l’Intérim « ce qui coûte cher à la collectivité ».
C’est aussi une question de formation.
80% des aides à domicile sont des femmes issues de l’immigration sub-saharienne et maghrébine. Elles ne sont pas formées pour beaucoup d’entre elles, sont isolées, sans possibilité d’échanger.
Cela pose parfois des problèmes de code, certaines d’entre elles peuvent être victimes de racisme. Objets de maltraitance, elles peuvent aussi en être les sujets.
C’est enfin une question de salaire.
La Métropole accorde dans le cadre d’un Contrat pluri-annuel d’objectifs et de moyens, un financement complémentaire pour couvrir les coûts d’intervention de l’ordre de « 3,31 euros par heure, tant les tarifs nationaux sont bas.
Les documents préparatoires nous ont présenté la réforme en cours portant sur la fusion des services qui assuraient le soin ( les SSIAD ) et les services d’aide ( SAAD ) en un seul service SAD : Service Autonomie à Domicile.
Mais si l’on ne peut que saluer la simplification des parcours, si l’on peut apprécier la vision large de la prise en compte des besoins, nombreuses sont les questions concernant les professionnels salariés qui vont être mobilisés :
• Relatives aux soins à domicile : aura -t-on le personnel médical pour cela ? En médecins, en infirmiers, en spécialistes ? L’association des gérontologues alerte sur les manques dans ce domaine.
• Relatives au repérage des fragilités. Qui va s’en charger ? Et avec quelle qualification ?
• Relatives à la prévention : 16% des plus de 75 ans n’ont pas de médecin traitant. Dans 10 ans, 40% de médecins généralistes vont partir à la retraite. De plus, la prévention ne devrait-elle pas se faire tout au long de la vie ? Or la médecine scolaire est très dégradée, et la médecine du travail quasiment inexistante.
• Relatives aux 2h de convivialité accordées : assurées par des aides à domicile submergées et en turn over permanent ?
Enfin, la Métropole s’appuie beaucoup sur les aidants. Nous répétons que les aidants ne sont pas des professionnels et que leur nombre, compte tenu des évolutions sociétales, va diminuer.
Face à la crise du recrutement, la Métropole tente de valoriser le métier d’aide à domicile par la communication : plate-forme des métiers du prendre soin, film hommage aux professionnels dans le cadre du festival des métiers d’avril et mai.
Nous avons rappelé fortement nos revendications concernant ces professionnels : un nombre suffisant en regard des besoins, une formation diplomante avec un salaire en conséquence, un statut valorisant de façon à ce que l’aide à domicile soit considérée comme un vrai métier.
Denise Bordes.