10 novembre 2023

L’actualité de l’académie

Lutte contre le harcèlement en milieu scolaire :
2 heures banalisées ... et après ?

    Partager cet article :
Lutte contre le harcèlement en milieu scolaire : 2 heures banalisées ... et (…)

La journée de lutte contre le harcèlement était prévue le jeudi 9 novembre par le ministère. Devant un calendrier aussi serré au regard de ce qui était attendu, les représentant.es des personnels sont intervenu.es afin d’élargir la période. Ils et elles ont obtenu dans tous les collèges et les lycées, que les deux heures du temps scolaire dédiées à la passation du questionnaire soient banalisées entre le 9 et le 16 novembre, afin de permettre aux élèves de remplir un questionnaire anonyme visant à évaluer s’ils sont susceptibles d’être victimes de harcèlement scolaire.
Au-delà de la méthode caractérisée par de la précipitation et des injonctions descendantes, que nous critiquons, quels sont les objectifs de cette démarche si ce n’est d’avoir des chiffres pour la communication du ministère (notons cependant que la DEEP disposent des ces informations sur l’année scolaire 2022/2023) ?
Durant cette semaine, dans chaque établissement les élèves auront à remplir une grille d’auto-évaluation autour de deux heures banalisées. Un guide prévoit le déroulement de cette modalité.
Ainsi, apprend-on :

  • que la passation du questionnaire n’est pas obligatoire pour les élèves ;
  • que le recueil de la parole des élèves peut être violent d’où le fait que la passation de ce questionnaire doit se faire par binôme afin de porter une attention particulière aux réactions des élèves ainsi qu’aux émotions que certains pourraient manifester ;
  • que les élèves sont libres de prendre le temps qu’ils et elles souhaitent pour répondre à chaque question ;
  • que le/la professeur ;e en charge de la classe ou le/la professeur.e principal.e examine les questionnaires et procède au décompte des réponses pour chaque questionnaire (nombre de réponses 1, 2, 3, 4), en fait une analyse qu’il partage avec le/la chef.fe d’établissement ;
  • qu’une restitution est prévue à destination des parents et des élèves en temps d’échange selon l’organisation de l’établissement ;
  • qu’une analyse statistique reposant sur un échantillon d’établissements tirés au sort sera réalisée ;
  • que tous les personnels seront formé.es à la lutte contre le harcèlement ;
  • qu’un coordinateur harcèlement sera nommé dans chaque établissement (avec IMP) ;
  • que tout fait de harcèlement sera signalé au procureur de la république ;

  • Ces modalités ne sont pas sans problèmes, puisque elles laissent des biais importants quant à la solitude des élèves face aux questions, quant à l’anonymat, quant au traitement de l’information recueillie, quant à la rémunération des tâches supplémentaires pour les collègues, quant au financement de la formation des personnels… Par ailleurs, ces tâches supplémentaires pour les enseignant.es émanant du guide ne sont pas une obligation car ne relevant pas de nos obligation réglementaires de service.
    Pour le SNES-FSU, l’efficacité de la lutte contre le harcèlement en milieu scolaire repose sur des collectifs de travail, dans le respect des qualifications et des métiers, avec des équipes pluriprofessionnelles au complet, formées, et disposant du temps de concertation nécessaire. Combien d’établissements scolaires sont encore sans CPE, sans infirmière, sans assistante sociale sans psychologue de l’éducation nationale, sans AED en nombre suffisant ? Où trouver le temps pour travailler en équipe quand la charge de travail explose ?
    Faute de moyens réels, le plan interministériel de lutte contre le harcèlement apparaît malheureusement comme un simple plan de communication, laissant les collègues démuni-es, hormis la judiciarisation du problème. Quel apport et traitement éducatifs en la circonstance ?
    Le harcèlement scolaire est un fléau qui nécessite la mobilisation de toute la communauté éducative et, bien au-delà, de toute la société : c’est à l’Éducation nationale de faire en sorte que les jeunes scolarisé•es ne soient plus les victimes des réseaux sociaux et à l ’État de rappeler les responsabilités de ceux-ci en matière de cyberharcèlement. Cela ne peut se traiter ni dans la précipitation, ni de manière prescriptive et obligatoire au regard de la pertinence de qui est demandé et du temps forcément long pour appréhender et traiter le phénomène.